Le Projet d'arrêté
Mais quelle mouche a donc piqué les agents de la DDTM de l’Ille-et-Vilaine ? Alors que le Tribunal administratif de Rennes, saisi par l’ASPAS et AVES France, a annulé l’arrêté préfectoral d’Ille-et-Vilaine qui autorisait une période complémentaire de vénerie sous terre du 1er juin au 14 septembre 2021 et du 1er au 30 juin 2022, la préfecture a pris un nouvel arrêté autorisant deux périodes complémentaires de vénerie sous terre du blaireau, en 2022 et 2023. Les blaireaux qui devaient être épargnés pendant la période complémentaire du 1er juin 2022 à l’ouverture générale de la chasse ont donc pu être chassés à cause d’un doublon volontaire de la période complémentaire, les agents de la DDTM ayant anticipé leur défaite devant le tribunal administratif.
Pire, cet arrêté a été pris le 1er juin 2022 suite à une consultation publique identique à celle qui avait conduit le tribunal administratif de Rennes à annuler le précédent arrêté, aucune donnée sur les blaireaux n’ayant été mise à disposition du public.
Alors que nous menacions de saisir à nouveau le tribunal administratif pour faire annuler cet arrêté, la préfecture a mis en ligne une nouvelle consultation publique sur l’arrêté déjà adopté le 1er juin 2022, avec cette fois des données relatives au blaireau fournies par la Fédération des chasseurs de l’Ille-et-Vilaine.
La préfecture demande donc au public de se prononcer sur un arrêté déjà en cours, en fournissant des données qui auraient du être mises à disposition du public il y a plusieurs semaines ! Cet arrêté porte sur une période complémentaire qui a pourtant déjà été annulée par le tribunal administratif le 13 juin dernier !
AVES France vous invite à dénoncer massivement les magouilles des agents de la DDTM de l’Ille-et-Vilaine en participant à cette consultation publique.
Le projet d’arrêté est soumis à consultation du public à propos de l’autorisation de vénerie sous terre du blaireau instaurant une période complémentaire du 1er juin 2022 au 14 septembre 2022, et du 1er juin 2023 au 30 juin 2023 (Article 3).
La préfecture a publié une une note de présentation qui contient des données incohérentes sur le blaireau et des chiffres différents de ceux que cette même préfecture nous a communiqué en 2021.
AVES France vous invite à vous opposer à ce projet d’arrêté jusqu’au 8 août 2022.
Important : pour que votre avis soit pris en compte, ne faites pas de copié-collé mais rédigez un message personnalisé. Il doit-être envoyé via le formulaire dédié jusqu’au 8 août 2022.
Afin d’éviter toute impossibilité de donner votre avis, nous vous conseillons de l’envoyer au minimum un jour plus tôt avant la fin de la consultation.
Si possible, envoyez votre avis dès réception de cette publication.
Je tiens à m’opposer à votre projet d’arrêté en ce qu’il autorise une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau allant du 1er juin 2022 au 14 septembre 2022, et du 1er juin 2023 au 30 juin 2023.
→ Veillez à préciser dans votre avis les nouveaux éléments mentionnés en rouge SUR LE FOND de l’arrêté.
Monsieur le Préfet de l’Ille-et-Vilaine,
Je tiens à m’opposer à votre projet d’arrêté préfectoral autorisant une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau en 2022 et 2023
SUR LA FORME :
- Par une décision du 13 juin 2022, le Tribunal administratif de Rennes a condamnée la préfecture de l’Ille-et-Vilaine et annulé l’article 3 de l’arrêté du préfet d’Ille-et-Vilaine du 11 juin 2021 relatif à l’ouverture et à la clôture de la chasse pour la campagne 2021-2022 dans le département d’Ille- et-Vilaine en tant qu’il autorisait une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau du 1er juin 2021 au 14 septembre 2021 et du 1er juin 2022 au 30 juin 2022. Anticipant cette condamnation, les agents de la DDT ont mis à la consultation publique un arrêté portant sur l’ouverture de la chasse pour la saison 2022/2023, comprenant à nouveau une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau allant cette fois du 1er juin 2022 au 14 septembre 2022, et du 1er juin 2023 au 30 juin 2023, sans fournir plus d’éléments aux contributeurs pour justifier cette chasse. Cet arrêté a été adopté le 1er juin 2022. Il est pourtant à nouveau soumis à la consultation du public, cette fois-ci en présentant des éléments fournis par la fédération des chasseurs de l’Ille-et-Vilaine et visant à justifier la période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau.
- La note de présentation publiée ne mentionne aucune information fiable relative au blaireau. Les données ont été fournies par la FDC sur la base d’observations, sans aucun cadre scientifique. Comment faire confiance à des données issues de comptages ou d’observations réalisées par les chasseurs, qui sont juge et partie ?
- L’état des populations de blaireaux n’est pas connu. Les seules données sont issues de comptages réalisés par les chasseurs eux-mêmes, qui considèrent que le blaireau est présent dans une commune dès qu’un individu est observé.
- Les données mises à disposition du public sont totalement différentes des données qui avaient été transmises à l’association AVES France par la préfecture en 2021.
- L’interprétation des données par la FDC est partiale et erronnée. Aussi, alors que le blaireau n’a été aperçu entre 2020 et 2022 que dans 113 communes sur les 331 prospectées, la carte de présence du blaireau lors des comptages indique que le blaireau est présent sur 238 communes, puisque des données anciennes et non pertinentes, datant de plus de 10 ans, y ont été ajoutées !
- Les données liées aux blaireaux victimes de collisions routières sur le Réseau Routier National sont incohérentes avec les données transmises en 2021 par la préfecture à l’association AVES France. Il semblerait donc que ces données soient erronées ou aient été manipulées pour amplifier le phénomène de collisions routières.
- Rien n’est mentionné concernant le chiffrage d’éventuels dégâts causés aux cultures agricoles par le blaireau.
- Le compte rendu de la CDCFS n’a pas été publié. Le public n’a donc pas connaissance des échanges qui se sont tenus au moment de la commission entre les défenseurs des intérêts cynégétiques et défenseurs des intérêts d’associations de protection de l’environnement notamment.
- Or, l’Article 7 de la Charte de l’Environnement précise que : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. »
- L’article 9 de la Convention de Berne prévoit des dérogations à la protection des espèces pour des motifs strictement définis, dont l’exercice récréatif de la chasse est exclu. Pourtant, la préfecture nous écrivait en 2021 qu’« Aucune mesure particulière pour éviter ou limiter d’éventuels dégâts provoqués par le blaireau n’a été mise en oeuvre dans le département d’Ille-et-Vilaine. »
- Concernant la contradiction entre l’article R-424.5 du Code de l’environnement et l’article L424.10 du même code, la DDT de l’Ardèche reconnait que l’autorisation de la période complémentaire est préjudiciable à la survie des jeunes:«L’exercice de la vénerie sous terre du Blaireau s’exerçait précédemment pendant une période de chasse complémentaire ouverte du 15 mai à l’ouverture générale. Il apparaît que cette période de chasse peut porter un préjudice à des jeunes pas encore émancipés. Le projet d’arrêté prévoit de différer le début de cette période complémentaire au 1er août 2022. »
La préfecture de l’Ille-et-Vilaine doit tenir compte de cette notification sur la période de dépendance des jeunes, qui est valable pour tous les départements. - Je me permets de vous rappeler qu’au moment de la publication de l’arrêté final, l’article L 123-19-1 du code de l’environnement stipule qu’« au plus tard à la date de la publication de la décision et pendant une durée minimale de trois mois, l’autorité administrative qui a pris la décision rend publics, par voie électronique, la synthèse des observations et propositions du public avec l’indication de celles dont il a été tenu compte, les observations et propositions déposées par voie électronique ainsi que, dans un document séparé, les motifs de la décision. » Je vous remercie donc de bien prévoir la publication d’une synthèse des avis qui vous ont été envoyés.
SUR LE FOND :
Le juge du TA de Poitiers a reconnu très récemment pour la Charente l’illégalité de l’autorisation de la période complémentaire en regard de la dépendance des petits vis-à-vis de leur mère, en admettant que la période d’émancipation se poursuit jusqu’en novembre. « Il résulte de l’instruction que les blaireautins sont encore en période de sevrage en mai et juin, que leur période de dépendance peut prendre fin en août et leur phase d’émancipation durer jusqu’au mois de novembre.»
Quant au juge du TA d’Amiens pour la Somme, celui-ci reconnait que l’autorisation de la période complémentaire au 15 juin est trop précoce: « Il résulte de l’instruction et notamment des données scientifiques produites au dossier que les blaireautins sont encore en période de sevrage en mai et juin et que leur période de dépendance aux adultes peut prendre fin entre août et novembre.»
- Le juge du TA de Châlons-en-Champagne pour l’Aube précise dans son ordonnance de jugement : « L’urgence résulte également de l’atteinte à l’équilibre biologique de l’espèce dans le département de l’Aube et de la destruction de jeunes blaireaux, non adultes, en méconnaissance de l’article L. 424-10 du code de l’environnement.»
- Certains départements n’autorisent plus la période complémentaire du blaireau, et notamment les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Hautes-Alpes, des Alpes-Maritimes, de l’Aude, des Bouches-du-Rhône (depuis 2016), de la Côte d’Or (depuis 2015), de l’Hérault (depuis 2014), du Var, du Vaucluse, des Vosges, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
En 2021 les administrations des départements de l’Ariège, Meurthe-et-Moselle, Moselle, Charente, Dordogne, Doubs, Loire, Morbihan, Pyrénées Orientales, Seine Maritime, Haute-Saône, Tarn, Yvelines et Yonne ne l’ont pas autorisé pour la première fois. - Les effectifs de blaireaux ainsi que les dégâts aux cultures agricoles imputés à cette espèce ne sont pas connus par l’administration.
- L’article 9 de la Convention de Berne n’autorise les dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées qu’« à condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas à la survie de la population concernée pour prévenir des dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et aux autres formes de propriété ». Pour être légales, les dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux blaireaux doivent être justifiées par trois conditions, devant être cumulativement vérifiées : la démonstration de dommages importants aux cultures notamment ; l’absence de solution alternative ; l’absence d’impact d’une telle mesure sur la survie de la population concernée. Ces trois conditions ont-elles été discutées lors de la Commission Départementale de la Chasse et de la Faune Sauvage ?
- Cette pratique, appelée « vénerie sous terre », est particulièrement barbare et cruelle. Elle inflige de profondes souffrances aux animaux puisqu’elle consiste à acculer les blaireaux dans leur terrier à l’aide de chiens, puis, pendant plusieurs heures, à creuser afin de les saisir avec des pinces. Les animaux, dans un état de stress très important, sont ensuite achevés à la dague.
- Les jeunes blaireaux de l’année ne sont pas entièrement sevrés et dépendent encore des adultes bien au delà du 15 mai. En effet, les périodes choisies pour ces périodes complémentaires de chasse du blaireau — sont en contradiction avec l’article L. 424-10 du Code de l’environnement, selon lequel « il est interdit de détruire (…) les portées ou petits de tous mammifères dont la chasse est autorisée ».
- Les jeunes blaireaux ne sont absolument pas sevrés et forcément ne sont pas émancipés au moment des périodes complémentaires de chasse du blaireau comme l’a démontré l’étude « Contribution à l’étude de la reproduction des Blaireaux Eurasiens (Meles meles) et de la période de dépendance des blaireautins en France » réalisée par Virginie Boyaval, éthologue sur le blaireau : « […] au mois de mai, juin, juillet, les blaireaux juvéniles ne peuvent pas survivre sans leur mère. Ils sont sevrés à l’âge de 4 mois et commencent progressivement leur émancipation pour une durée de plusieurs mois s’étalant de 1 à 4 mois et ne peuvent donc être considérés comme étant émancipés qu’à partir de l’âge de 6 à 8 mois minimum. La destruction des blaireaux compromet le succès de reproduction de l’espèce. La destruction des mères allaitantes, laisse de nombreux orphelins incapables de survivre seul ». Par conséquent pour épargner la nouvelle génération, il faut prendre en considération non pas la période de sevrage mais la période de dépendance des jeunes qui s’étale jusqu’au mois d’août minimum; il convient donc de préserver la vie des mères jusqu’à la fin de la période de dépendance des jeunes afin que ceux-ci puissent survivre.
- La période d’allaitement des blaireautins s’étale au-delà du 15 mai, et les jeunes restent dépendants jusqu’à l’automne, ils sont donc présents dans les terriers pendant la période de déterrage. Il est donc nécessaire de prendre en considération la période dépendance des jeunes comme référence et non pas le sevrage lui-même si l’on veut respecter la survie des jeunes.
- La vénerie sous terre n’est pas sans conséquences pour d’autres espèces sauvages. En effet, une fois l’opération terminée, les terriers se trouvent fortement dégradés. Or ces derniers sont régulièrement utilisés par d’autres espèces, dont certaines sont réglementairement protégées par arrêté ministériel et directive européenne, comme différentes espèces de reptiles et amphibiens (crapaud, lézard ocellé, espèces de serpents), le Chat forestier (Felis silvestris) ou des chiroptères lorsque certaines espèces sont en phase d’hibernation pendant la période de septembre/octobre à fin avril : «Le Petit rhinolophe hiberne dans des gîtes souterrains (mines, caves, sous-sols ou même terriers de Renard ou de Blaireau)» source Atlas des Mammifères de Bretagne éd. 2015. Il en va de même pour le Grand Murin, le Petit Murin, le Murin des Marais (cf. Site Natura 2000 « les Rives du Tech- FR 910 1478 – Tome I – Annexe II – Fiches Espèces ».
- Le Conseil de l’Europe recommande d’interdire le déterrage : « Le creusage des terriers, à structure souvent très complexe et ancienne, a non seulement des effets néfastes pour les blaireaux, mais aussi pour diverses espèces cohabitantes, et doit être interdit. »
- Il faut obligatoirement que la totalité de la période de chasse du blaireau, qu’elle soit assortie d’une période complémentaire ou non, fasse l’objet de déclaration d’intervention auprès de la DDT et d’un compte-rendu de cette intervention. La fédération doit également être capable de fournir, lors de la commission, des éléments pertinents et exhaustifs sur les bilans annuels de tirs et de déterrage et non des données approximatives qui ne permettent pas d’avoir une idée de ce que cela représente par rapport aux populations départementales. Ces éléments chiffrés doivent être rendus publics. Or, ce projet d’arrêté est accompagné d’une note de présentation incomplète ne pouvant justifier cette période complémentaire.
- La période de tir, lorsqu’elle est autorisée jusqu’au 29 février, provoque potentiellement la mort des mères gestantes et ne doit en aucun être autorisé, en application de l’article L424.10 du Code de l’environnement visant à préserver la future génération.
À PROPOS DU BLAIREAU :
- Les populations de blaireaux sont fragiles et souffrent de la disparition de leurs habitats (haies, lisières, prairies, …) et sont fortement impactées par le trafic routier.
- Inscrit à l’annexe III de la Convention de Berne, le Blaireau d’Europe, Meles meles, est une espèce protégée (cf. art. 7). A titre dérogatoire, la Convention de Berne encadre strictement la pratique de la chasse et la destruction administrative de cette espèce (cf. art. 8 et 9). Le ministère de l’écologie doit soumettre « au Comité permanent un rapport biennal sur les dérogations faites ».
- Aux termes de l’article L. 424-10 du Code de l’environnement, « il est interdit de détruire (…) les portées ou petits de tous mammifères dont la chasse est autorisée ». Or, l’article R424-5 du même code précise toutefois que le préfet peut autoriser l’exercice de la vénerie du blaireau pour une période complémentaire à partir du 15 mai, cet article contrevient donc au précédent.
- La dynamique des populations de blaireaux est extrêmement faible (moyenne de 2,3 jeunes par femelle et par an).
- Cette espèce n’est jamais abondante (mortalité juvénile très importante (de l’ordre de 50% la 1ère année).
- Une mortalité importante de blaireaux est liée au trafic routier.
- Les opérations de vénerie peuvent affecter considérablement les effectifs de blaireaux et peuvent entraîner une disparition locale de cette espèce.
- Les bilans annuels relatifs à la vénerie sous terre sont généralement très bas et ne régulent pas du tout les populations. Les collisions routières ont certainement un impact bien plus important que le déterrage. Si ces prélèvements ne permettent pas de réguler les populations (pour de quelconques raisons sanitaires ou économiques), alors pourquoi continuer d’accorder des autorisations de déterrage, si ce n’est de contenter quelques acharnés de la pratique de vénerie sous terre ?
- Les dégâts que le blaireau peut occasionner dans les cultures de céréales sont peu importants et très localisés, essentiellement en lisière de forêt. Selon l’Office National de la Chasse ONC bulletin mensuel n° 104 : « Les dégâts que peut faire le blaireau dans les cultures ne sont gênants que très localement (…) Et il suffit de tendre une cordelette enduite de répulsif à 15 cm du sol pour le dissuader de goûter aux cultures humaines. »
- En ce qui concerne les éventuels dégâts causés sur les digues, routes ou ouvrages hydrauliques par le creusement des terriers, la régulation du blaireau a montré son inefficacité, voire même un effet contre-productif du fait de la place libérée par l’animal éliminé qui est très vite occupée par un autre individu.
- Une méthode simple et pérenne consiste à utiliser des produits répulsifs olfactifs sur les terriers posant problème, ceci accompagné de la mise à disposition à proximité de terriers artificiels. Les avantages de cette solution sont que les animaux continueront d’occuper un territoire sur le même secteur et ne permettront pas l’intrusion d’un nouveau clan. (source : LPO Alsace)
Consultation en cours.
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