Côtes-d’Armor : consultation publique sur la période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau

Le Projet d'arrêté

Le projet d’arrêté soumis à consultation du public concerne l’exercice de la chasse pour la saison 2021/2022 dans les Côtes d’Armor.

Dans son article 6, il autorise la vénerie sous terre pour le renard et le blaireau. Il prévoit également une période complémentaire de vénerie sous terre pour le blaireau à partir du 15 mai 2022. 

La préfecture a publié une note de présentation et de nombreux documents sur le blaireau que nous vous invitons à consulter ici.

AVES France vous invite à vous opposer à ce projet d’arrêté. La consultation est ouverte du 9 juin 2021 au 1er juillet 2021. 

Important : pour que votre avis soit pris en compte, ne faites pas de copié-collé mais rédigez un message personnalisé. Il doit-être envoyé par email à  :

[email protected]

entre le 9 juin 2021 et le 1er juillet 2021, avec comme objet « exercice chasse 2021-2022 ».  

Nos arguments à reprendre et personnaliser pour la rédaction de votre commentaire

Important : pour que votre avis soit pris en compte, ne faites pas de copié-collé mais rédigez un message personnalisé.

Monsieur Thierry MOSIMANN, Préfet des Côtes-d’Armor,

Les services de la DDTM des Côtes d’Armor ont mis à la consultation du public le Projet d’arrêté relatif à l’exercice de la chasse 2021/2022 dans les Côtes d’Armor, projet auquel je m’oppose pour les raisons suivantes : 

  • Votre projet d’arrêté prévoit d’autoriser la vénerie sous terre du renard et du blaireau du 15 septembre 2021 au 15 janvier 2022. Cette pratique, appelée « vénerie sous terre », est particulièrement barbare et cruelle. Elle inflige de profondes souffrances aux animaux puisqu’elle consiste à acculer les renards et les blaireaux dans leur terrier à l’aide de chiens, puis, pendant plusieurs heures, à creuser afin de les saisir avec des pinces. Les animaux, dans un état de stress très important, sont ensuite achevés à la dague. Cette pratique devrait être interdite. 
  • Votre projet d’arrêté propose également d’autoriser la pratique de la vénerie sous terre du blaireau pour une période complémentaire, du 15 mai 2022 au 14 septembre 2022. J’y suis farouchement opposé.

 

SUR LA FORME : 

  • La note de présentation, bien que détaillée dans votre document sur le blaireau, montre que vous ignorez l’état des populations. Ne sont donc communiqués ni les effectifs de blaireaux, ni les dommages causés (nature, localisation et coûts). Le public ne peut se prononcer sans ces éléments. Dans ce cas, rien ne justifie la période complémentaire. Par ailleurs, il n’est mentionné nulle part la mise en place de mesures préventives qui pourraient facilement solutionner les rares dommages causés par ces animaux.
  • Or, l’Article 7 de la Charte de l’Environnement précise que : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. »
  • L’article 9 de la Convention prévoit des dérogations à la protection des espèces pour des motifs strictement définis, dont l’exercice récréatif de la chasse est exclu.
  • Concernant la contradiction entre l’article R-424.5 du Code de l’environnement et l’article L424.10 du même code, la DDT de l’Ardèche reconnait que l’autorisation de la période complémentaire est préjudiciable à la survie des jeunes :
    « L’exercice de la vénerie sous terre du Blaireau s’exerçait précédemment pendant une période de chasse complémentaire ouverte du 15 mai à l’ouverture générale. Il apparaît que cette période de chasse peut porter un préjudice à des jeunes pas encore émancipés. Le projet d’arrêté prévoit de différer le début de cette période complémentaire au 1er août 2022. »
    La préfecture des Côtes-d’Armor doit tenir compte de cette notification sur la période de dépendance des jeunes, qui est valable pour tous les départements.
  • Je me permets de vous rappeler qu’au moment de la publication de l’arrêté final, l’article L 123-19-1 du code de l’environnement stipule qu’ « au plus tard à la date de la publication de la décision et pendant une durée minimale de trois mois, l’autorité administrative qui a pris la décision rend publics, par voie électronique, la synthèse des observations et propositions du public avec l’indication de celles dont il a été tenu compte, les observations et propositions déposées par voie électronique ainsi que, dans un document séparé, les motifs de la décision. » Je vous remercie donc de bien prévoir la publication d’une synthèse des avis qui vous ont été envoyés.

 

SUR LE FOND : 

  • Certains départements n’autorisent plus la période complémentaire du blaireau, et notamment les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Hautes-Alpes, des Alpes-Maritimes, de l’Aude, des Bouches-du-Rhône (depuis 2016), de la Côte d’Or (depuis 2015), de l’Hérault (depuis 2014), du Var, du Vaucluse, des Vosges, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
  • L’article 9 de la Convention de Berne n’autorise les dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées qu’« à condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas à la survie de la population concernée pour prévenir des dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et aux autres formes de propriété ». Pour être légales, les dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux blaireaux doivent être justifiées par trois conditions, devant être cumulativement vérifiées : la démonstration de dommages importants aux cultures notamment ; l’absence de solution alternative ; l’absence d’impact d’une telle mesure sur la survie de la population concernée. Ces trois conditions ont-elles été discutées lors de la Commission Départementale de la Chasse et de la Faune Sauvage ?
  • Les chiffres que vous présentez sur le nombre de blaireaux prélevés en 2020 montrent que sur 400 blaireaux tués, seuls 50 l’ont été suite à des plaintes, soit 12,5%. Les 350 autres ont été déterrés et tués pour que des chasseurs puissent assouvir leur passion malsaine. 
  • Les documents que vous présentez ne montrent aucune recherche de solution visant à favoriser la cohabitation pour éviter la mise à mort de ces animaux, ni aucun chiffrage des dégâts attribués aux blaireaux.  
  • Lorsque la vénerie sous terre est pratiquée avant l’ouverture générale de la chasse, les jeunes blaireaux de l’année sont encore dépendants des adultes. En effet, les périodes choisies pour ces abattages — tout comme les périodes complémentaires de chasse du blaireau — sont en contradiction avec  l’article L. 424-10 du Code de l’environnement, selon lequel « il est interdit de détruire (…) les portées ou petits de tous mammifères dont la chasse est autorisée ».
  • Les jeunes blaireaux ne sont absolument pas sevrés et forcément ne sont pas émancipés au moment des périodes complémentaires de chasse du blaireau comme l’a démontré l’étude « Contribution à l’étude de la reproduction des Blaireaux Eurasiens (Meles meles) et de la période de dépendance des blaireautins en France » réalisée par Virginie Boyaval, éthologue sur le blaireau : « […] au mois de mai, juin, juillet, les blaireaux juvéniles ne peuvent pas survivre sans leur mère. Ils sont sevrés à l’âge de 4 mois et commencent progressivement leur émancipation pour une durée de plusieurs mois s’étalant de 1 à 4 mois et ne peuvent donc être considérés comme étant émancipés qu’à partir de l’âge de 6 à 8 mois minimum. La destruction des blaireaux, débutant généralement à partir de la mi-mai, compromet le succès de reproduction de l’espèce. La destruction des mères allaitantes, laisse de nombreux orphelins incapables de survivre seul ». Par conséquent pour épargner la nouvelle génération, il faut prendre en considération non pas la période de sevrage mais la période de dépendance des jeunes qui va jusqu’à fin juillet ; il convient donc de préserver la vie des mères jusqu’à la fin de la période de dépendance des jeunes afin que ceux-ci puissent survivre.
  • La période d’allaitement des blaireautins s’étale au-delà du 15 mai, et les jeunes restent dépendants jusqu’à l’automne, ils sont donc présents dans les terriers pendant la période de déterrage. Il est donc nécessaire de prendre en considération la période dépendance des jeunes comme référence et non pas le sevrage lui-même si l’on veut respecter la survie des jeunes.
  • L’étude des chiffres que vous nous présentez montre qu’au cours de l’année 2020, 26% des blaireaux prélevés étaient des jeunes. Votre arrêté est donc illégal puisqu’il va à l’encontre de l’article L. 424-10 du Code de l’environnement.
  • Vous justifiez l’importance de la période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau en prétextant que seulement 11 % des prélèvements sont réalisées hors période complémentaire. Cette proportion est même inférieure à 5 % depuis 2018 peut être du fait d’une période dite « normale » moins favorable à la vénerie sous terre et de membres d’équipages mobilisés durant la période normale sur d’autres activités. Il n’est pas normal d’autoriser une période complémentaire qui met en danger les blaireautins pour la seule raison que les équipages de vénerie sous terre sont occupés à d’autres loisirs en période dite normale ! 
  • La vénerie sous terre n’est pas sans conséquences pour d’autres espèces sauvages. En effet, une fois l’opération terminée, les terriers se trouvent fortement dégradés. Or ces derniers sont régulièrement utilisés par d’autres espèces, dont certaines sont réglementairement protégées par arrêté ministériel et directive européenne, comme le Chat forestier (Felis silvestris) pour les départements concernés ou des chiroptères lorsque certaines espèces sont en phase d’hibernation pendant la période de septembre/octobre à fin avril : «Le Petit rhinolophe hiberne dans des gîtes souterrains (mines, caves, sous-sols ou même terriers de Renard ou de Blaireau)» source Atlas des Mammifères de Bretagne éd. 2015.
  • Le Conseil de l’Europe recommande d’interdire le déterrage : « Le creusage des terriers, à structure souvent très complexe et ancienne, a non seulement des effets néfastes pour les blaireaux, mais aussi pour diverses espèces cohabitantes, et doit être interdit. »

 

À PROPOS DU BLAIREAU :

  • Les populations de blaireaux sont fragiles et souffrent de la disparition de leurs habitats (haies, lisières, prairies, …) et sont fortement impactées par le trafic routier, comme le montre votre document (445 collisions en entre 2014 et 2020 sur le réseau DIRO département 22). Le blaireau n’est pas responsable de ces collisions, mais en est la victime ! Plutôt que d’intensifier la chasse, votre rôle de préfet est de limiter la vitesse de circulation la nuit sur les axes concernés afin d’y protéger les automobilistes et la faune sauvage ! Vos chiffres montrent qu’en 2020, il n’y a eu que 22 collisions. Ce chiffre relativement bas est sans doute une conséquence de la crise sanitaire et des restrictions de circulation. Cela prouve qu’en prenant des mesures de sécurité routière, vous pourriez limiter le nombre d’accidents dont les blaireaux sont les innocentes victimes. 
  • Inscrit à l’annexe III de la Convention de Berne, le Blaireau d’Europe, Meles meles, est une espèce protégée (cf. art. 7). A titre dérogatoire, la Convention de Berne encadre strictement la pratique de la chasse et la destruction administrative de cette espèce (cf. art. 8 et 9). Le ministère de l’écologie doit soumettre « au Comité permanent un rapport biennal sur les dérogations faites ».
  • Aux termes de l’article L. 424-10 du Code de l’environnement, « il est interdit de détruire (…) les portées ou petits de tous mammifères dont la chasse est autorisée ». Or, l’article R424-5 du même code précise toutefois que le préfet peut autoriser l’exercice de la vénerie du blaireau pour une période complémentaire à partir du 15 mai, cet article contrevient donc au précédent.
  • La dynamique des populations de blaireaux est extrêmement faible (moyenne de 2,3 jeunes par an).
  • Cette espèce n’est jamais abondante (mortalité juvénile très importante (de l’ordre de 50% la 1ère année).
  • Les opérations de vénerie peuvent affecter considérablement les effectifs de blaireaux et peuvent entraîner une disparition locale de cette espèce.
  • Les dégâts que le blaireau peut occasionner dans les cultures de céréales sont peu importants et très localisés, essentiellement en lisière de forêt. Selon l’Office National de la Chasse ONC bulletin mensuel n° 104 : « Les dégâts que peut faire le blaireau dans les cultures ne sont gênants que très localement (…) Et il suffit de tendre une cordelette enduite de répulsif à 15 cm du sol pour le dissuader de goûter aux cultures humaines. »
  • En ce qui concerne les éventuels dégâts causés sur les digues, routes ou ouvrages hydrauliques par le creusement des terriers, la régulation du blaireau a montré son inefficacité, voire même un effet contre-productif du fait de la place libérée par l’animal éliminé qui est très vite occupée par un autre individu.
  • Une méthode simple et pérenne consiste à utiliser des produits répulsifs olfactifs sur les terriers posant problème, ceci accompagné de la mise à disposition à proximité de terriers artificiels. Les avantages de cette solution sont que les animaux continueront d’occuper un territoire sur le même secteur et ne permettront pas l’intrusion d’un nouveau clan. (source : LPO Alsace)