Pour lire le projet d’arrêté : http://cotes-darmor.gouv.fr/Publications/Consultations-publiques-Environnement/Consultations-en-cours/Ouverture-fermeture-de-la-chasse-2018-2019
Monsieur le Préfet propose, dans son projet d’arrêté relatif à l’ouverture-fermeture de la chasse en 2018-2019 :
une période complémentaire allant du 15 mai au 14 septembre 2019.
pour envoyer vos avis : [email protected]
Nos arguments à reprendre et personnaliser
A noter, certains départements n’autorisent plus la période complémentaire:
les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Hautes-Alpes, des Alpes-Maritimes, de l’Aude, des Bouches-du-Rhône (depuis 2016), de la Côte d’Or (depuis 2015), de l’Hérault (depuis 2014), du Var, du Vaucluse, des Vosges, de l’Yonne (depuis 2016), des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
A propos de la vénerie sous terre :
Cette pratique, appelée « vénerie sous terre », est particulièrement barbare et cruelle. Elle inflige de profondes souffrances aux animaux puisqu’elle consiste à acculer les blaireaux dans leur terrier à l’aide de chiens, puis, pendant plusieurs heures, à creuser afin de les saisir avec des pinces. Les animaux, dans un état de stress très important, sont ensuite achevés à la dague. De plus, lorsque la vénerie est pratiquée à partir du 15 mai, les jeunes blaireaux de l’année ne sont pas entièrement sevrés et dépendent encore des adultes.
Cette pratique n’est pas non plus sans conséquence pour d’autres espèces sauvages. En effet, une fois l’opération terminée, les terriers se trouvent fortement dégradés. Or ces derniers sont régulièrement utilisés par d’autres espèces, dont certaines sont réglementairement protégées par arrêté ministériel et directive européenne, comme le Chat forestier (Felis silvestris) ou des chiroptères.
Les recommandations du Conseil de l’Europe vont d’ailleurs en ce sens : « Le creusage des terriers, à structure souvent très complexe et ancienne, a non seulement des effets néfastes pour les blaireaux, mais aussi pour diverses espèces cohabitantes, et doit être interdit. »
ATTENTION : De plus, dans le cadre de la lutte contre la tuberculose bovine, l’article 7 de l’arrêté ministériel du 7 décembre 2016 relatif à certaines mesures de surveillance et de lutte contre la tuberculose lors de la mise en évidence de cette maladie dans la faune sauvage énonce, parmi les mesures de prévention dans les zones à risque, « [l’]interdiction de la pratique de la vénerie sous terre pour toutes espèces dont la chasse est autorisée en raison du risque de contamination pour les équipages de chiens ».
A propos du blaireau :
Les populations de blaireaux sont fragiles et souffrent de la disparition de leurs habitats (haies, lisières, prairies, …) et sont fortement impactées par le trafic routier.
Inscrit à l’annexe III de la Convention de Berne, le Blaireau d’Europe, Meles meles, est une espèce protégée (cf. art. 7). A titre dérogatoire, la Convention de Berne encadre strictement la pratique de la chasse et la destruction administrative de cette espèce (cf. art. 8 et 9). Le ministère de l’écologie doit soumettre « au Comité permanent un rapport biennal sur les dérogations faites ».
Aux termes de l’article L. 424-10 du Code de l’environnement, « il est interdit de détruire (…) les portées ou petits de tous mammifères dont la chasse est autorisée ». Or, l’article R424-5 du même code précise toutefois que le préfet peut autoriser l’exercice de la vénerie du blaireau pour une période complémentaire à partir du 15 mai, cet article contrevient donc au précédent.
Globalement la dynamique des populations de blaireaux est extrêmement faible (moyenne de 2,3 jeunes par an). Cette espèce n’est jamais abondante (mortalité juvénile très importante (de l’ordre de 50% la 1ère année). De plus une mortalité importante existe déjà due au trafic routier. Ces opérations de vénerie peuvent affecter considérablement ses effectifs et peuvent entraîner une disparition locale de cette espèce.
Sur les dégâts éventuels causés et interactions avec les activités humaines:
Les dégâts que le blaireau peut occasionner dans les cultures de céréales sont peu importants et très localisés, essentiellement en lisière de forêt.
En ce qui concerne les éventuels dégâts causés sur les digues, routes ou ouvrages hydrauliques par le creusement des terriers, la régulation du blaireau a montré son inefficacité voire même un effet contre-productif du fait de la place libérée par l’animal éliminé qui est très vite occupée par un autre individu.
Une méthode simple et pérenne consiste à utiliser des produits répulsifs olfactifs sur les terriers posant problème, ceci accompagné de la mise à disposition à proximité de terriers artificiels. Les avantages de cette solution sont que les animaux continueront d’occuper un territoire sur le même secteur et ne permettront pas l’intrusion d’un nouveau clan.(source : LPO Alsace)
Avis envoyé à la préfecture:
Bonjour,
je viens de prendre connaissance du projet d’arrêté préfectoral relatif à l’exercice de la chasse dans le département des Côtes-d’Armor pour la campagne 2018-2019, mon avis se concentre sur l’application d’une période complémentaire de chasse pour le blaireau.
Je pense que l’application de cette période complémentaire de chasse n’est pas pertinente eu égard notamment au fait que cet animal ne cause aucun préjudice économique et sanitaire.
L’application d’une période complémentaire de chasse du blaireau n’a d’autre but que celui de satisfaire un loisir cynégétique à une période où il n’y a rien à chasse hormis les battues administratives. Par conséquent, avancer la période chasse de quatre mois me semble totalement excessif. Plus largement, la chasse du blaireau ne répond à aucune nécessité, d’autant plus que sa chair n’est pas consommée.
Cette ouverture de chasse relative au blaireau précoce pour l’année 2019 ne respecte pas le cycle biologique du blaireau et est en contradiction avec l’article L. 424-10 du Code de l’environnement, selon lequel « il est interdit de détruire (…) les portées ou petits de tous mammifères dont la chasse est autorisée ».Or, l’article R424-5 du même code précise toutefois que le préfet peut autoriser l’exercice de la vénerie du blaireau pour une période complémentaire à partir du 15 mai, cet article est en contradiction avec le précédent. D’après une étude menée par Virginie Boyaval, éthologue sur le blaireau, «un blaireautin n’est pas indépendant avant fin juin-début juillet». Les dents définitives sortent à environ 3 mois, âge du sevrage qui peut être retardé de 4 à 6 mois si la nourriture est rare. D’autres sources corroborent cette affirmation: http://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/blaireau/184830 «Le sevrage, qui est progressif, intervient vers 12 semaines ; il est définitif vers 4 ou 5 mois environ. Au cours de cette période, la femelle apporte de la nourriture à ses petits – le mâle aussi, parfois. Les premières sorties ont lieu vers 8 semaines. Dès l’âge de 5 à 8 mois, les jeunes cherchent seuls leur nourriture.» http://www.cerfe.com/media/pdf/bodin2005_phd.pdf « Hiver : décembre à février : baisse d’activité hivernale, gestation et mise bas, 1ère période d’accouplement, – Printemps : mars à mai : reprise de l’activité après l’hiver, élevage des jeunes au terrier, – Eté : juillet – août : sevrage des jeunes, – Automne : septembre à novembre : accumulation de réserves de graisse, 2ème période d’accouplement.» Il a été constaté selon d’autres sources que certains jeunes demeurent avec leur mère et en dépendent probablement jusqu’en automne et durant le premier hiver. En résumé sur ce point, les réponses notifiées dans les motivations d’arrêtés affirmant que les blaireautins sont sevrés dès le 15 mai sont fausses. Autoriser l’ouverture de la chasse du blaireau dès le 15 mai contrevient donc de façon évidente à l’article L. 424-10 du Code de l’environnement, merci d’en tenir compte.
J’attire également votre attention sur le fait que le blaireau joue le rôle d’indicateur de la dynamique écologique des boisements et de la fonctionnalité des corridors écologiques en contexte périurbain. En effet, l’espèce ayant une valence écologique plutôt élevée, son état de conservation est révélateur dans une certaine mesure de la dynamique globale des habitats pour la moyenne et grande faune, ainsi que de la fonctionnalité des corridors écologiques. Son régime est partiellement carnivore, ce qui signifie qu’il a un rôle de régulation des populations de certains animaux qui peuvent devenir ravageurs ou indésirables, tels que des micro-mammifères, des limaces, escargots etc. Ils peuvent donc être considérés comme des auxiliaires, vis-à-vis des cultures ou de la proximité des habitations. Cet animal est aussi utile dans la dissémination des espèces fruitières, car il se nourrit de fruits et ne digère pas la lignine. Lorsqu’il dépose ses laissées dans des crottiers, les graines et noyaux sont éparpillés sur son domaine vital qui représente plusieurs hectares. Elles pourront plus tard pousser et assurer une variété d’espèces assurant gîte et couvert à d’autres espèces animales.
Cet animal est inscrit en annexe 3 de la Convention de Berne. Celle-ci encadre strictement la chasse et la destruction administrative de cette espèce (cf article 8 et 9). Le ministère de l’Ecologie doit soumettre «au comité permanent un rapport biennal sur les dérogations faites».
Aussi, la chasse du blaireau est autorisée à titre dérogatoire à conditions que ses effectifs soient maintenus hors de danger, or il n’existe aucune cartographie faisant état des populations actuelles. Partant de ce constat, il est impossible d’affirmer que les populations de blaireaux ne sont pas impactées et mises en danger par l’application d’une période complémentaire de chasse. Les effectifs du blaireau sont fragiles, cet animal a une dynamique de reproduction particulièrement lente ; ce mustélidé est très peu prolifique et la mortalité juvénile est très importante (1 jeunes sur 2 ne dépasse pas l’âge d’un an). Ce mustélidé souffre déjà largement du trafic routier et de la destruction de son habitat. Une période complémentaire de chasse ne ferait qu’augmenter une mortalité qui est déjà forte.
Quant aux dégâts pouvant être causés aux abords des routes, digues ou infrastructures hydrauliques, il existe des solutions efficaces et pacifiques qui permettent d’éviter l’élimination de la colonie. Une étude publiée par la LPO Alsace a démontré que l’utilisation de répulsif olfactif est très efficace lorsque cette action est couplée avec la mise à disposition de terriers artificiels à proximité des lieux sensibles pour les inciter à les occuper. La venue d’une nouvelle colonie sur les terriers où l’animal a été repoussé est alors empêchée par le clan qui occupe le terrier artificiel à proximité. En effet, dans le cas d’une régulation de blaireaux éliminés d’un territoire, les individus disparus seront rapidement remplacés par d’autres et creuseront de nouvelles galeries, causant encore plus de dégâts sur les infrastructures. En résumé sur ce point, la régulation du blaireau au niveau des abords de routes et d’ouvrages hydrauliques est contre-productive.
Les lieutenants de louveterie ont l’obligation de cesser immédiatement l’action de déterrage si une espèce protégée comme la chauve-souris ou le chat forestier occupe les galeries. Cette obligation dans la pratique n’est jamais respectée, tout comme celle de remettre en état les terriers détruits. En effet, le rebouchage grossier du terrier ne répond pas à cette obligation. Il convient donc que la remise en état du site détruit soit parfaitement réalisé. Pour cela, un protocole précis de remise en état du site détruit doit être exigé et ensuite validé par un agent assermenté. Pour autant, la remise en état ne garantie aucunement la réinstallation des éventuels chiroptères ou autres espèces protégées ayant occupé le terrier précédemment.
Je pense également que cette période de chasse, qu’elle soit assortie d’une période complémentaire ou non, doit obligatoirement faire l’objet de déclaration d’intervention auprès de la DDTM et d’un compte-rendu de cette intervention.
Pour finir, il serait judicieux de prendre en compte les remarques du Conseils de l’Europe qui préconise l’interdiction de la vénerie sous terre eu égard aux effets néfastes qu’elle engendre sur les blaireaux et les espèces qui cohabitent avec le clan: « Le creusage des terriers, à structure souvent très complexe et ancienne, a non seulement des effets néfastes pour les blaireaux, mais aussi pour diverses espèces cohabitantes, et doit être interdit.»
Pour les raisons évoquées plus haut, je pense que la période complémentaire de chasse du blaireau ne doit pas être appliquée.
Merci également de prendre en considération la contestation citoyenne sur cette chasse cruelle et injustifiée. Pour votre information, une pétition demandant le classement du blaireau comme espèce protégée rassemble aujourd’hui plus de 226.000 signatures: http://change.org/ProtectionBlaireau
Sincères salutations
Frédéric DANIEL